• Dans une démocratie représentative comme la nôtre, où l'information est diffusée par les médias de masse, un parti politique ne peut espérer remporter des élections qu'à travers son image médiatique.

    Le travail des militants sur le terrain ne suffira jamais à se faire connaître à une échelle assez grande. Le nombre d'adhérents ne sera jamais suffisant pour peser dans la balance électorale. Les meetings, les déplacements, ne valent que par l'écho médiatique qu'on en donne.

    Un nouveau parti politique reconnu par les médias ne peut être créé que par quelqu'un de déjà connu d'eux. Le Modem de Bayrou, le PG de Mélanchon, se sont non seulement adossés à des partis politiques préexistants (ruines de l'UDF, PCF) mais ont encore profité du carnet d'adresse que seule la déjà longue carrière politique de leur leader a pu constituer.

    Il faut ajouter à ces considérations très pratiques, que la représentation du candidat par les médias, intervient en amont de la représentation politique qu'il brigue et donc la détermine. Au traitement lapidaire que ceux-ci réservent aux « petits candidats » (voir par exemple ici : http://www.acrimed.org/article3784.html) répond la maîtrise totale des images de campagne des candidats « sérieux » (ainsi les images de meetings ou de déplacements diffusées en tant qu'information sont en réalité des images de propagandes du parti politique en question, puisque produite par une société privée au service de ce seul parti.)

    On me dira que la "stricte égalité" des candidats pour le temps d'antenne est garantie dans la période précédent immédiatement l'élection (à partir d'aujourd'hui). Cela met-il réellement tous les candidats à égalité ?

    D'abord, comment un candidat dont on ne parle jamais pourrait-il rattraper, en si peu de temps, un déficit de notoriété dans l'esprit des citoyens, par rapport à ceux qui font toute l'année, chaque jour, les gros titres?

    Ensuite, cela ne change rien au traitement des candidats selon l'importance que leur prêtent les journalistes chargés de leur donner la parole. Il y a bien longtemps que Bourdieu a montré comment l'orientation des questions, le ton employé, les interruptions, les relances pressantes, rendent tout relatif cet accès à une parole publique. Les études d'acrimed, entre autres, montrent à quel point dans ce domaine rien n'a changé.

     Enfin, il est notable que les journalistes eux-mêmes se plaignent de cette égalité de traitement quantitatif (sur le qualitatif, voir le paragraphe précédent!) qu'on leur impose pourtant sur un laps de temps très restreint. On devine bien derrière une argumentation confuse, le souci pressant de l'audimat. Comment des candidats dont on ne parle jamais, que personne ne connaît, qui ne sont pas présentés comme des candidats sérieux pourraient-ils intéresser le public autrement qu'au titre d'amusement épisodique?

    Le critère de la possibilité d'une parole publique est le premier à me faire douter du caractère démocratique de cette élection. Une parole publique, c'est-à-dire non pas seulement connue de tous, mais réellement accessible à tous (comme l'est un jardin public), est-elle simplement concevable dans notre civilisation? Internet change peut-être la donne, mais force est de constater que dans notre société, la télé et la radio ne sont pas réellement des moyens d'expression publique. Seuls ceux qui ont les clés du jardin décident qui entre, combien de temps, pour quoi faire, et même dans quelle tenue, - pour jouer quel rôle. Le régime de la parole médiatique n'est pas celui de la parole publique, c'est pourtant sur l'assimilation fallacieuse des deux que repose en grande partie notre démocratie représentative.

    Pour que l'accès au minimum d'informations indispensables à une décision politique éclairée (fût-elle aussi individuelle que le vote) soit réel, il faudrait que toutes les informations, c'est-à-dire toutes les analyses et options argumentées diverses existantes sur chaque sujet soient diffusées, expliquées et commentées constamment à égalité, ce qui impliquerait que l'accès aux médias de masse soit réellement public

    Que vaut la liberté d'exprimer des idées que l'on n'a pas les moyens de faire connaître suffisamment pour qu'elles puissent influer sur des décisions collectives? Ou qui seront systématiquement présentées comme irréalisables, utopiques, dangereuses, etc.


     


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  • On entend parfois parler d'un possible "printemps européen" comme si nos régimes politiques, étaient comparables aux dictatures arabes ou à l'oligarchie russe. Est-ce bien raisonnable?

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  • A

    Politique de la grippe A ou nettoyez-vous les mains au karsher.

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  • au lieu d'une réelle analyse des causes des symptômes, on se retrouve au final avec une simple dénonciation.

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  • De la défense de la recherche à la lutte contre la "profitation."

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