• Dans Eros et civilisation, Herbert Marcuse tente de montrer que le principe de réalité, conçu par la psychanalyse par opposition au principe de plaisir, a été abusivement identifié avec un principe de rendement, historiquement nécessaire au développement de l’activité économique. Or, selon lui, ce principe de rendement impose une « surrépression » de la libido.  Il estime, en écrivant ce livre, que les conditions sont réunies pour construire une utopie sociale qui ne serait plus fondée sur le principe de rendement et donc une morale répressive de la sexualité. L’énergie libidinale, (Eros, qui ne se réduit pas pour lui, simplement à "la sexualité") trouverait à s’investir dans les relations sociales. 

    Les événements qui ont remis en cause « l’ordre moral » (encore une tautologie ?) des démocraties occidentales dans les années 60-70 ont en effet voulu conjuguer libération des mœurs et progrès social (dans le sens de l’épanouissement de l’individu.)

    Et depuis 40 ans, nos régimes libéraux se sont employés à associer liberté sexuelle et liberté du marché, la déréglementation s’accommodant bien d’un certain dérèglement des mœurs, dans la mesure où il était mis au service d’intérêts privés. L’explosion des chaînes de télé privées dans les années 80 n’est-elle pas le facteur exponentiel du devenir voyeur du téléspectateur auquel on donnait enfin – mais à l’écran seulement - « ce qu’il voulait » (action, cul et fric.)

    Les nouveaux impératifs économiques exigent non plus de cacher mais d’exhiber la sexualité, une certaine sexualité, symbole d’un ordre faussement nouveau car imaginairement « hétéronormée », phallocentrique, patriarcale.

    Publicité, films, séries, jeux télévisés, émissions de radio, jeux vidéo, littérature, bd, tous ces vecteurs peuvent servir à la mise en scène d’une sexualité explicite, dont la représentation bien réelle pourrait elle-même être devenue répressive.

    Reste à expliquer comment la servitude naît dans la « liberté. » Pourquoi le désir gît dans la domination. 


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  • Peut-on parler de morale sexuelle ? Ne s’agit-il pas d’une alliance paradoxale de mots de sens contraires (oxymore) ? La sexualité n’est-elle pas l’ennemie de toute morale, comme le montrent l’œuvre de Sade aussi bien que celle de Freud ? La morale, n’est-ce pas le nom que l’on donne à cette forme d’emprise culturelle qui tente de contrôler et réguler les pulsions sexuelles, pour leur donner une expression compatible avec la vie en société ? La morale n’est-elle pas un aspect de la construction de la sexualité humaine en tant que telle ? Y a-t-il, à la réflexion, d’autre morale que sexuelle, l’expression « morale sexuelle », n’est-elle pas plutôt une tautologie ?

    La morale est étymologiquement affaire de mœurs, de conduites sociales prescrites, d’habitus culturels. La « brigade des mœurs » en France, a longtemps désigné une section de la police chargée de surveiller… la prostitution ! Car celle-ci a longtemps été tolérée comme une soupape nécessaire à la préservation de l’ordre établi. En ce sens, la morale qui condamne la sexualité pour la maintenir hors de vue est synonyme de mensonge, d’hypocrisie sociale.

    Historiquement, la morale sexuelle a une justification religieuse. D’après certains historiens, la nôtre serait héritière de la Renaissance. En effet, cette époque est traversée par l’affrontement entre la réforme et la contre- réforme. Protestants et Catholiques entrent en compétition pour imposer un modèle de vie austère, plus conforme à une lecture idéale du texte biblique. L’évolution de l’activité économique urbaine, soumise au rendement et au profit, permet, voire produit, cette évolution des mentalités. De nouvelles formes de contrôle social s’installent. L’enracinement biblique de nouvel ordre moral pousse à couvrir de honte tout ce qui a trait à la sexualité. Même si au fil des siècles, la notion de péché s’estompe, le sentiment de culpabilité, lui, perdure.

    « Culpabilité », ça veut dire quoi ? Honte, gêne, embarras ( à parler, dire, montrer) mais aussi ostentation, étalage,  injonction, défi… (tous les comportements possibles d’un accusé au tribunal, si l’on accepte que c’est l’accusation – d’où qu’elle vienne - qui fait le coupable.)

    Comme la guerre avec le meurtrier, il faut un contexte qui transforme le crime en devoir ( l’acte réprouvé en acte valorisé.)

    L’horizon sexuel  reste donc le couple d’essence familiale (qu’il soit homo ou hétéro.) En ce sens, l’amour libre n’existe pas. Mais les chaînes sont peut-être plus excitantes…


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  • La France, c'est maintenant qu'elle décide. Aujourd'hui, on va savoir si elle est forte, si elle est faible, ce qu'elle dit.

    Un petit parcours en chansons...

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  • Dans une démocratie représentative comme la nôtre, où l'information est diffusée par les médias de masse, un parti politique ne peut espérer remporter des élections qu'à travers son image médiatique.

    Le travail des militants sur le terrain ne suffira jamais à se faire connaître à une échelle assez grande. Le nombre d'adhérents ne sera jamais suffisant pour peser dans la balance électorale. Les meetings, les déplacements, ne valent que par l'écho médiatique qu'on en donne.

    Un nouveau parti politique reconnu par les médias ne peut être créé que par quelqu'un de déjà connu d'eux. Le Modem de Bayrou, le PG de Mélanchon, se sont non seulement adossés à des partis politiques préexistants (ruines de l'UDF, PCF) mais ont encore profité du carnet d'adresse que seule la déjà longue carrière politique de leur leader a pu constituer.

    Il faut ajouter à ces considérations très pratiques, que la représentation du candidat par les médias, intervient en amont de la représentation politique qu'il brigue et donc la détermine. Au traitement lapidaire que ceux-ci réservent aux « petits candidats » (voir par exemple ici : http://www.acrimed.org/article3784.html) répond la maîtrise totale des images de campagne des candidats « sérieux » (ainsi les images de meetings ou de déplacements diffusées en tant qu'information sont en réalité des images de propagandes du parti politique en question, puisque produite par une société privée au service de ce seul parti.)

    On me dira que la "stricte égalité" des candidats pour le temps d'antenne est garantie dans la période précédent immédiatement l'élection (à partir d'aujourd'hui). Cela met-il réellement tous les candidats à égalité ?

    D'abord, comment un candidat dont on ne parle jamais pourrait-il rattraper, en si peu de temps, un déficit de notoriété dans l'esprit des citoyens, par rapport à ceux qui font toute l'année, chaque jour, les gros titres?

    Ensuite, cela ne change rien au traitement des candidats selon l'importance que leur prêtent les journalistes chargés de leur donner la parole. Il y a bien longtemps que Bourdieu a montré comment l'orientation des questions, le ton employé, les interruptions, les relances pressantes, rendent tout relatif cet accès à une parole publique. Les études d'acrimed, entre autres, montrent à quel point dans ce domaine rien n'a changé.

     Enfin, il est notable que les journalistes eux-mêmes se plaignent de cette égalité de traitement quantitatif (sur le qualitatif, voir le paragraphe précédent!) qu'on leur impose pourtant sur un laps de temps très restreint. On devine bien derrière une argumentation confuse, le souci pressant de l'audimat. Comment des candidats dont on ne parle jamais, que personne ne connaît, qui ne sont pas présentés comme des candidats sérieux pourraient-ils intéresser le public autrement qu'au titre d'amusement épisodique?

    Le critère de la possibilité d'une parole publique est le premier à me faire douter du caractère démocratique de cette élection. Une parole publique, c'est-à-dire non pas seulement connue de tous, mais réellement accessible à tous (comme l'est un jardin public), est-elle simplement concevable dans notre civilisation? Internet change peut-être la donne, mais force est de constater que dans notre société, la télé et la radio ne sont pas réellement des moyens d'expression publique. Seuls ceux qui ont les clés du jardin décident qui entre, combien de temps, pour quoi faire, et même dans quelle tenue, - pour jouer quel rôle. Le régime de la parole médiatique n'est pas celui de la parole publique, c'est pourtant sur l'assimilation fallacieuse des deux que repose en grande partie notre démocratie représentative.

    Pour que l'accès au minimum d'informations indispensables à une décision politique éclairée (fût-elle aussi individuelle que le vote) soit réel, il faudrait que toutes les informations, c'est-à-dire toutes les analyses et options argumentées diverses existantes sur chaque sujet soient diffusées, expliquées et commentées constamment à égalité, ce qui impliquerait que l'accès aux médias de masse soit réellement public

    Que vaut la liberté d'exprimer des idées que l'on n'a pas les moyens de faire connaître suffisamment pour qu'elles puissent influer sur des décisions collectives? Ou qui seront systématiquement présentées comme irréalisables, utopiques, dangereuses, etc.


     


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    "Dans ce monde qui n'est peut-être pas le meilleur des mondes, mais qui est le nôtre, le printemps était revenu." Ce pourrait être la conclusion de l'article précédent.

    Pourtant, une fable, moins "raisonnable", pourrait nous faire douter...

      "Mais le printemps et tous ses sortilèges ne parvenait pas à voiler..."

    Quoiqu'en dise les commentateurs satisfaits, l'apologue d'Orwell n'illustrerait-il pas aussi bien la réalité de nos sociétés à démocratie élective?

     Serait-il  possible en effet que les élections qui s'organisent n'arrivent plus vraiment à voiler...

     

     


    Voire que nous soyons nous-mêmes dans une ère post-révolutionnaire, possesseurs de la ferme, mais gouvernés par des élites qui, à l'instar de César, savent mieux que nous où est notre intérêt.

    Et tous les "sacrifices" exigés au nom du moulin européen...




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